[Test] Broken Mind - Xbox - Dessine-moi un cauchemar

Dans Broken Mind vous serez plongé dans la peau du très torturé Frank Morgan, un détective de police au passé dramatique dont le présent ne rime qu’avec la culpabilité de n’avoir pu sauver sa fille d’une mort horrible. Les journées si insipides et irréelles, les nuits inondées de cauchemars si réels sont en passe d’avoir raison de lui… jusqu’au coup de fil fatidique.

Des dessins à la modélisation, en passant par le gameplay, les animations, le scénario et bien d’autres aspects, Broken Mind est l'œuvre d’une seule personne talentueuse : Tony De Lucia, du studio indépendant français 2BAD GAMES. Fruit de cinq ans de développement, il s’agit de son projet les plus ambitieux qui fait suite à d’autres titres plus “modestes” mais tout aussi intéressants : 2URVIVE et Brutal Rage, eux aussi sortis sur consoles (Xbox, PS4 et Switch). Cette fois-ci la 3D sera à l’honneur… Dessins à la main et polygones feront-ils bon ménage ? C’est ce que nous allons voir de suite ! Plongeons ensemble au cœur des enfers.

 

Fiche technique :

• Genre : FPS, enquête, survival horror, puzzle
• Développeur : Tony De Lucia
• Editeur : 2BAD GAMES
• Langues : Français (sous-titres et interfaces), Anglais (Voix)
• Plateformes : Xbox, Switch, PS4
• Testé sur : Xbox One S
• Prix : 9,99 €
• Version : 1.0.0.5
• Taille : 501 Mo
• Date de sortie : 21 juin 2022
• Acheter : Switch, Playstation, Xbox

 

L’antichambre de Morgan

Dès le menu, une chose nous frappe. L’agent Morgan, semblant tout droit sorti d’une ancienne bande dessinée, nous accueille, le regard perçant, flingue à la main, et l’air à la fois déterminé et… à bout de souffle. A côté de lui, le menu comporte les entrées habituelles que sont : Nouvelle partie, Charger, Options, Bonus (grisé pour l’instant), Crédits.

Les options permettent de consulter la disposition des contrôles de la manette, ajuster la luminosité, la sensibilité de la vue, activer les vibrations, la musique… et quelques autres éléments d’accessibilités comme les fonds de sous-titres, la difficulté et les diverses assistances.

Quatre niveaux de difficultés sont proposés, de “narratif” (aucun combat mais des énigmes) à “difficile” (courage !). Ce choix aura un impact sur le nombre d’ennemis, leur hargne ainsi que les munitions et ressources à notre disposition. Le mode normal est suffisamment accessible mais vous devrez faire très attention à vos munitions et à votre jauge de vie.

 

En quête de sommeil

Nos premiers pas dans le jeu se font dans une demeure étrange et abandonnée.

Broken Mind est un jeu de tir à la première personne qui pour l’instant nous équipe d’une simple lampe torche… et de notre courage. La visite des lieux se joue un peu comme un Outlast avec une obscurité omniprésente et une distance de visibilité assez courte. Les contrôles tombent directement sous les doigts. On observe autour de nous à la recherche d’indices ou de détails. En commençant la visite, on comprend assez rapidement que quelque chose ne tourne pas rond dans cette baraque car des sortes de racines semblent s’approprier les lieux, grouillant au plafond, émergeant du sol et barrant parfois le chemin, empêchant tout retour en arrière.

Certaines portes sont barrées d’un ruban de scène de crime, d’autres sont carrément enchaînées… Nous sommes poussé vers la découverte de clés et autres objets… des photos aux murs, des pièces, des chambres, des meubles, des portes, encore des pièces, des passages étroits et une sorte de vapeur de suie qui accroît le sentiment de claustrophobie.

Ce couloir est en fait un labyrinthe qui se transforme en permanence, nous provoque, répète les lieux que nous rencontrons en changeant un détail à la fois à chaque itération. La mise en contexte se fait rapidement avec la découverte d’inscriptions, de lettres et autres articles au détour d’un couloir qu’on était persuadé de ne pas avoir vu en passant là la dernière fois...

Drôle d'endroit pour stocker du vin.

 

Ce ne peut être qu’un cauchemar ? Au détour d’un salon, le bon vieux flingue, fidèle allié de notre ami, est retrouvé posé négligemment au sol. Avoir un flingue c’est plutôt bien mais se servir de ses bras et ses jambes est un sacré plus que nous invite à découvrir rapidement le jeu. En effet nous n’allons pas simplement viser et shooter. Une sorte de tuto déguisé comme on en a l’habitude, diablement efficace et accompagné d’instructions nous aide à prendre nos membres en main. D’ailleurs tout au long du jeu, les nouveaux éléments de gameplay seront expliqués la première fois que l’on tombe dessus.

Il ne s'agira pas de bourriner uniquement car Broken mind va nous proposer quelques puzzles de progression. Si vous êtes observateurs, ceux-ci ne posent absolument aucun problème. Ils servent bien évidemment à débloquer la suite du scénario (un peu comme dans le jeu In Rays Of The Light pour ne citer que lui).

De plus en plus violemment exposé à ses démons, et harcelé par sa mauvaise conscience, il est grand temps pour l’agent Morgan de se réveiller… Rideau.

 

Night Call

Un appel dans la nuit met fin à ce que l’on pourrait penser être un cauchemar. Le collègue de longue date de Franck l’appelle pour venir enquêter sur la disparition au beau milieu de la nuit sous une pluie battante de la jeune Laura Campbell, ce qui n’est pas sans évoquer de vieux souvenirs. Fait improbable, l’enlèvement s’est produit en plein live retransmis par la gamine sur une plateforme de streaming.

C’est mal fringué et fatigué, que notre mission d'enquêteur va démarrer sur les lieux du crime… Après avoir discuté avec quelques collègues et son coéquipier, Franck prend les choses en main et c’est une fouille sans précédent qui s’amorce avec une petite séance d’observation dans la chambre de la fille et les pièces de la maison familiale.

...et surtout un passage en mode "hacker/forensic" pour notre quadragénaire, qui va devoir s’introduire dans l’ordinateur de la jeune fille pour ramasser un max de preuves. Je dois avouer que cette petite séance de puzzle pour tour à tour : réussir à ouvrir la session, lire les mails, glaner des infos sur les réseaux sociaux et enfin accéder au compte de la plateforme de streaming, était plus qu'intéressante et bien reproduite. Enfin une enquête digne du 21e siècle ! :D

Bienvenue sur Mindows Broksta. Ne perdez pas de vue que chaque information, même la plus banale, pourrait bien vous être utile.

 

Le paroxysme de nos découvertes sera l’accès à l’archive vidéo du live que nous n’allons pas tarder à consulter.

 

Surprise sur prise

Il est temps pour nous de revivre le direct pour tenter de découvrir ce qu’il s’est passé, mais pas comme on le pensait.. Le jeu nous pose non pas comme un simple observateur mais va carrément nous mettre à la place de Laura un peu avant que les faits se produisent. Nous allons donc disposer d’une vue toujours en FPS, verticale comme celle du téléphone qui a servi à filmer, accompagné des bandeaux de discussion sur la gauche de l’écran et à droite ce qui la fille annonce qu’elle va faire (un rappel des “missions” que nous aurons à remplir) accompagné du nombre de viewers de pleins de petits coeurs qui s’envolent. Le soucis du détail est là et on a l’impression d’y être.

D’une banale soirée chill en mode “just chatting” la situation va peu à peu se dégrader avec un orage qui fait péter les plombs. Ici aussi nous allons avoir un certains nombre de tâches à effectuer, la nécessité de farfouiller un peu partout dans les pièces de la maison, l'atelier, la sombre cave... pour avancer dans l'histoire.

Certains de nos viewers tentent de nous aider via l’espace de chat tandis que d’autres font mine de penser à un fake ou se contente de lancer des “t’es bien charmante” pour être poli. Notre personnage est entraîné progressivement et malgré lui vers son destin auquel nous tenterons de l’aider à s’échapper, mais l’histoire est déjà écrite…

 

Trois face d’une même pièce

Vous vous doutez bien que je ne pourrais pas vous en dire plus à ce stade mais l’enquête prendra immédiatement un nouveau tournant quand une fois de retour dans la peau de l’agent Morgan (des heures après donc…) on lui signalera que le téléphone de Laura a recommencé à émettre…

On a trouvé le tel mais pas Laura...

 

Le joueur que nous somme va devoir continuer l’enquête, et cela se fera tantôt avec L’agent Morgan dans le sinistre monde réel, tantôt dans une version dark de celui-ci (mélange de monde d’en dessous, cauchemar, flashbacks… est-ce de la folie ?), tantôt directement dans la peau de la victime dès lors que le scénario tentera de rapprocher ces deux personnages.

Dans ces trois perspectives du jeu, vous allez devoir jouer à cache-cache, vous battre, résoudre des puzzles, récupérer des indices, casser des choses, en réparer d’autres… et surtout trouver ce qui a bien pu arriver à Laura. S'il y a espoir qu'elle reste encore en vie assez longtemps pour être sauvée, l’agent Morgan n’hésitera pas à se présenter face au danger au péril de sa vie.

 

Une gameplay convenu, des idées fraîches

Broken mind aborde un gameplay assez classique que les fans de FPS bourrins trouveront un peu mou. Ici c’est avant tout la subtilité qui est de mise avec un personnage qui se déplace à échelle humaine... et peut même courir (ou plutôt marcher rapidement, vieillesse de Frank oblige ;p). Ce ne sera pas sans conséquence puisque notre jauge de souffle représentée habillement par des poumons va rapidement se vider… il faudra immédiatement arrêter les efforts sous peine de commencer à voir trouble et devoir reprendre notre souffle durant plusieurs secondes… C’est à ce moment que nous sommes le plus vulnérable !

De la même manière, la mise en scène et le gameplay s’entrelacent parfaitement. Quand un ennemi est proche (et ne nous a pas forcément vu d’ailleurs) notre cœur s’emballe, on l’entend, notre image tremble tout comme la manette, c’est signe qu’il faut soit se cacher soit se battre. Un petit rappel de ce que l’on ressentait quand le radar commençait à biper dans Alien Trilogy. Le sens du détail va jusqu’à la netteté de l’image qui devient de manière très infime floue à chaque battement, donnant un sentiment étrangement naturel à notre vision pourtant simplifiée du monde de Broken Mind.

Tous les coups sont permis !

 

Comme évoqué précédemment, l’aspect puzzle est lui aussi des plus classique, dirigiste, …déjà vu certains diront. Ces énigmes disséminées un peu partout et indispensables à notre progression m’ont rappelé celles d’un jeu testé récemment : 35MM. Chiffres ou formes à trouver pour reconstituer des codes de cadenas, clés, objets, outils, leviers, cartes… le but sera à chaque fois de nous libérer le passage vers la suite de manière de plus en plus originale.

Si l'on va expérimenter le métier d'électricien en herbe, nous aurons également l'occasion de devenir serrurier.

L'inventaire, très simple d'utilisation, sera d'une aide précieuse

 

Coup de fil, coup de flip, coup de flic

La face sombre de l’aventure se rappelle à notre bon souvenir et rythme de manière plutôt bien maîtrisée le déroulé du scénario. On en apprendra un peu plus sur le passé de Frank, son entourage et ses démons. Passé et présent cohabitant de manière plus en plus étroite, nous verrons des liens se tisser minutieusement. L’alternance de ces phases nous prouve qu’il est psychologiquement très affecté, et sa vie est aussi importante à préserver dans le monde des souvenirs sombres que dans le présent. Tout est dans la continuité, munitions, objets et jauge de vie sont communes.

L’occasion de se prendre quelques sursauts avec des apparitions fugaces, un téléphone qui sonne et une voix sombre qui tente d’envoyer notre héros par le fond.

L’aspect First Person Beat ‘em all propose une autre façon de voir les jeux à la première personne avec du combat rapproché : esquive, coup de poing, coup de pied, blocage… il sera nécessaire de savoir se battre à mains nues. Ce sera pour ainsi dire inévitable alors économisez bien vos balles pour les ennemis les plus coriaces, si vous visez bien il sera possible d’en abattre d’une seule balle.

Les environnements de Broken mind sont variés et parfois labyrinthiques (juste ce qu’il faut) et on sent la volonté de l’auteur de proposer le moins possible de sensation de déjà vu malgré le peu de moyens. Intérieurs de bâtiments variés, extérieurs, étages, caves, égouts, toits… on verra du paysage dans les profondeurs comme en altitude. C’est plutôt réussi même si ça et là on remarquera des portions de décors assez semblables, surtout en extérieurs.

Côté variété, de courtes phases de QTE, “interrogatoires” et discussions avec des personnages secondaires sont également de mise. On aura également droit à plusieurs formes d'interactions à distance, temps réel et très bien réalisées.

 

Gribouille ma grise mine

Il n’est pas courant de retrouver une direction artistique comme celle de Broken Mind. Après le livre, le jeu ultra pixelisé 8bits ou encore le jeu ultra réaliste raytracé dont vous êtes le héros, Broken mind pose un postulat totalement assumé, à savoir : mélanger dessin à la main de style BD à un jeu en 3D… un peu comme XIII me direz vous ? Si de loin les similitudes pourraient frapper, de près nous ne distinguons pas la même technique pour donner un look BD à tout ce qui compose notre environnement (même si du cell shading est parcimonieusement utilisé). Le dessin est presque l'unique matière première, que les objets soient en 2D ou bien 3D. La composition des niveaux et leur granularité fait de prime abord penser à une construction à la Minecraft tout en proposant bien plus de finesses dans les "blocs" de construction et assets à disposition.

Les goûts ne se discutent pas et je comprendrais que ce ne soit pas votre tasse de café mais j’apprécie le coup de crayon, enfin les coups car il y a eu énormément d'assets créés et de dessins confectionnés pour arriver à assembler toutes les textures et animations nécessaires au jeu... on ne se rend compte de cela qu’une fois la partie bonus débloquée et savourée. Celle-ci montre à quel point un projet de jeu peut différer entre sa genèse et sa sortie... et à quel point cela demande du temps et l’investissement personnel. Même si l’aspect semble assez simple, c’est pour moi une force du jeu : une excellente lisibilité et accessibilité. "Dommage" que les sujets abordés soient tragiques car il pourrait être joué par un public de joueurs assez large.

On notera que sur le plan sonore, la narration et les voix sont omniprésentes (parfois répétitives certes). Le doublage (en anglais) est d'ailleurs de bonne facture pour un jeu indé ! La musique quant à elle s’éveille davantage lors des phases dramatiques et est elle aussi bien composée. Les bruitages sont dans la moyenne de ce que l’on est en droit d’attendre de ce type de jeu d’aventure. Tous ces points mis bout à bout font que l’immersion est bien là. Malgré quelques rebondissements, nous arrivons rapidement à la conclusion du jeu (et de ce test), un peu trop court à mon goût mais l'expérience valait le coup d'être vécue !

 

Verdict :

 

Nous remercions 2BAD GAMES qui nous a fourni une copie de review du jeu